Au début des années 2020, le consensus de la Silicon Valley se délite. Inégalités folles, stagnation de la productivité, instabilité endémique… la nouvelle économie n’est pas advenue. Les algorithmes sont omniprésents, mais ce n’est pas pour autant que le capitalisme s’est civilisé. Au contraire.

Avec la digitalisation du monde se produit une grande régression. Retour des monopoles, dépendance des sujets aux plateformes, brouillage de la distinction entre l’économique et le politique : les mutations à l’œuvre transforment la qualité des processus sociaux et donnent une actualité nouvelle au féodalisme.

Cette mutation du mode de production, c’est à dire de notre manière de produire et de consommer à l’échelle de la société, renvoie à une logique politique advenue dans les années 1990, le consensus de la Silicon Valley, et à une logique technologique qui découle de la structure des coûts dans le numérique.

L’hégémonie des GAFA, la monopolisation intellectuelle dans les chaînes globales de valeur, l’atomisation des travailleur·euses des plateformes ou encore le système de crédit social chinois représentent différentes facettes de l’ordre économico-politique émergent. Les grandes firmes se disputent le cyberespace pour prendre le contrôle sur des sources de données. Les sujets sont attachés à la glèbe numérique. Les capitaux délaissent la production pour se concentrer sur la prédation.